Atlas Express
Au sommet du sommet du Maroc !
En voilà un grand récit ! 15 pages ! Mais pour une aussi longue traversée, il fallait bien ça ! Et comme nous avons essayé d’éviter tout au long de nos articles le style journal, au jour le jour, nous nous y sommes essayés pour cet ultime récit d’aventures !
C’est parti pour la traversée du Haut Atlas, du M’goun jusqu’au Toubkal, soyez courageux !
J0: départ de Taghia
Nous quittons les belles falaises de ce joli petit village pour aller faire fonctionner un peu nos guibolles. Retour à Zaouia avec notre fidèle âne, toujours aussi costaud ! Nous profitons de cette heure de marche sans rien sur le dos car on sait que ce sera loin d'être le cas dans les jours qui viennent. Après une petite pause rafraîchissante dans un café, nous prenons la route pour Tabant (on aurait voulu partir directement de Taghia qui est sur la route de la grande traversée de l'Atlas mais la rentrée approchant à grands pas pour certains, nous ne disposions pas d'assez de jours pour faire l'ensemble du parcours prévu, on a donc décidé de commencer un peu plus à l'ouest). C'est le frère de Said qui nous emmène, mais ici pas question de faire un trajet à vide! Alors que nous sommes placés comme des rois à l'avant, dans la benne on superpose chèvre, sacs et voyageurs (si si la chèvre en dessous je vous assure!). Sur la route nous rencontrons notre premier orage, qui ne sera pas le dernier mais on le recoit avec plaisir; enfin un peu de fraîcheur!
Le soir nous logeons chez un ami de Said, un gite très sympathique, ou nous rencontrons un groupe d'étudiants grenoblois, comme quoi le monde est petit! Ils sont là pour un mois et construisent un canal pour améliorer l'irrigation des champs du village. Ils viennent de renter de leur chantier et se préparent pour un foot avec les jeunes du villages. Nous nous joignons à eux avec plaisir! Un chouette moment de partage, défoulant et amusant malgré, ne vous le cachons pas, notre (très) faible niveau en foot! Après un petit tajine, nous enchainons par la petite fête locale, sur la terrasse du gite les hommes (pas de femmes locales malheureusement....) dansent et chantent au rythme de la flûte et des tambourins qui l'accompagnent. Encore un chouette moment !
J1 :Tabant- Plateau de Tarkedite
Après cette journée de transition, nous nous levons la tête dans le fion ( fallait que ça rime), déjà fatigués avant d'avoir commencés. Mais c'est une grande aventure qui commence, et la motivation est là! De toute façon il y a interêt car l'on a prévu de se taper 1600m de déniv et quasi 30 bornes aujourd'hui. Nous partons à 9h comme des nullos, et nous traversons le marché aux bestiaux de Tabant, après une petite demi-heure. Je dois m'acheter un "nouvo chapo" pour éviter de me retrouver à l'hosto le premier jour, avec une insolation du cerveau. Enfin ya pas d'hosto à moins de 100km de toutes façons, donc on va éviter de se faire mal. Un peu de pain dans notre besace et on peut enfin s'y mettre... Qu'est ce qu'il est agréable ce sac chargé de 6/7 jours de bouffe, j'ai toujours rêvé d'être un héros grec, alors Sisyphe c'est plutôt stylé! On traverse des champs, c'est plutot champêtre (c'est dingue, des champs champêtres), et Anouk chourre des pommes dans les vergers, ça nous raffraichit un peu.
La vallée des Aït Bougmez, les gens heureux...
Nous traversons de beaux villages ombragés par les noyers, et nous nous engageons dans la vallée à la recherche du graal de toute la traversée, un spot pour midi avec de l'ombre ET de l'eau ! Par chance aujourd'hui, il y a de l'ombre et de l'eau partout puisqu'un gros orage pête avant même que nous ayons faim! Tant pis, on se met plus ou moins sous un caillou comme des gitanos, on ouvre le pot de rilletes et on observe un beau phénomène s'entrainant surement pour remporter les darwin awards. Le gonziau arrive avec sa grosse bagnole,inversement proportionnel au niveau de développement cérébral comme l'on sait, au pied de la seule antenne telecom du coin. L'orage fait plutôt peur, on voit des grosses zébrures traverser l'horizon et de bons boums en conséquence. Vu que monter sur une structure métallique pointue de 20 mètres de haut, au milieu de la plaine, en plein orage est pas forcément la première idée qui nous viendrait en tête à nous autres ingénus, on se dit que le mec doit savoir ce qu'il fait...Eh bien quel n'est pas notre étonnement quand le gugusse perché au sommet de son paratonnerre géant se met à prendre des selfies ! Le niveau de connerie atteon est sidéral. Je savais que prendre des selfies conduisait à explorer les infinies contrées du ridicule, mais celui-là préfère sans doute le danger extrême... Bon de toutes façons suicidons nous ensemble, l'humanité court à sa perte, nous avons inventé la perche à selfies! Non je déconne, lisez mon article avant de passer à l'acte!
Bref, nous avons eu un déjeuner divertissant. Nous repartons une fois la pluie calmée, les nuages sont toujours là, c'est parfait pour marcher. Ce matin, nous avons fait des bornes, mais 0 metres de déniv, donc 1600 qui restent... On va pas s'ennuyer cette aprem ! Nous arrivons à Ikkis vers les 16 heures, là d'après le topo on a fait une étape et on devrait dormir sur place... Mais on préfère en faire une seconde, c'est plus drôle. Enfin pour vous, pas pour nous hein. Finalement ça passe pas si mal, le profil se fait plus raide, plus montagne, parce que nous on aime pas trop le plat... On atteint un premier col à 2800 vers 19 heures, puis un second à 3300 qui pique un peu les jambes...
Le gros col de fin de journée
Après 1700 de déniv dans la journée avec presque 20 kg sur le dos, il faut bien une bonne bouteille de ketchup!
On est content, il ne nous reste plus qu'une heure de descente jusqu'au beau plateau de Tarkeddite. En face, la grande chaîne du M'goun, l'objectif du lendemain, culminant à 4070 mètres. Il fait enfin frais, et les paysages sont majestueux, rocailleux bien qu'un peu d'herbe parsème le fond des vallées. Nous arrivons avant la pénombre, sur un grand plateau herbeux, rempli de grandes tentes de style berbère, on se croirait débarqué en Mongolie ! En fait, il ne s'agit pas de nomades, mais de groupes d'agence ... Cependant, le tourisme à la marocaine ne lésine pas sur le confort, et il y a souvent plus d'un berbère par client, en comptant les muletiers, cuisiniers, guides...
Les repas sont dignes d'un restau à Marrakech, et les clients soignent leur dos puisqu'ils ont le droit à un matelas de pas moins de 30 cm d'épaisseur. Bon bah nous on va sortir notre réchaud à essence et notre tente quechua hein!
J2: Ascension du M’Goun
On se lève à 7h après avoir un peu méprisé le réveil pourtant réglé sur 5h30... On a pas trop bien dormi, carrément eu froid, ptetre qu'en fait prendre un duvet pour deux c'était une idée nulle! ( au final c'était très bien pour la suite du trek, où l'on a jamais eu froid avec simplement nos sacs à viande et un petit t-shirt...).
Evidemment il y a le groupe chiant qui nous dit "il est trop tard pour y aller, faites attention blablabla". C'est vrai qu'on part au moins 2 heures aprés tous les autres groupes..,mais on se met en mode grésivaudan Xpress, avec un sac pour deux et avant le col on commence à rattraper tout ce petit monde...
On a marché sur la lune...
Une partie de la longue traversée jusqu'au sommet... des cailloux, des cailloux, toujours des cailloux!
À 3900, on a quasiment fait toute la montée mais il reste 6 km d'arête en passant par des antécimes pour atteindre le vrai sommet.Le terrain est lunaire, ce sommet est un vrai tas de caillou... C'est loooong, mais sans sac on se sent voler. Enfin on rejoint le cairn sommital.
Enfin le "vrai" sommet!
Le casse croute à 4000 n'a jamais été aussi facile, même si il y a un peu de vent. Après le repas, la sieste, vive la rando à la journée! Enfin comme Gandalf, on dort les yeux ouverts pour surveiller que ces petits cumulonimbus ne dégénèrent pas trop vite.. Enfin, on attaque ce long chemin retour, et on passe finalement à travers les gouttes pour rejoindre notre tente resté au plateau. On est contents parce que ce sommet est symbolique de la traversée de l'Atlas, reliant M'goun et Toubkal, mais c'est clair que cette grosse bosse desertique n’est pas aussi esthétique que les cimes glacées du Pérou.
J3: Plateau de Tarkeddite-Amezri
Le réveil sonne et une fois de plus il est bien difficile d'ouvrir les yeux, sentant encore nos jambes engourlourdies de la veille. Je sors de la tente et me crois en Mongolie...les grandes tentes blanches, les ânes / chevaux qui se courent après, les autres qui broutent tranquillement sur ce grand plateau vert... ah oui c'est ça on est sur un grand plateau, celui de Tarkedit au Maroc ! Après ce petit voyage imaginaire nous dejeunons et plions rapidement le campement pour profiter de la fraîcheur matinale. Nous poursuivons la traversée de ce grand plateau en suivant le Tessaoute (rivière) naissant. Il serpente de façon étrangement régulière et forme autour de lui une herbe d'un joli vert, contrastant avec l'aridité environnante.
Le plateau de Tarkeddite, des airs de Mongolie
Du bleu et du vert au milieu de tout ce jaune!
Un troupeau de moutons se rue joyeusement dessus juste avant que les eaux ne s'engouffrent dans de profondes gorges. Là, nous quittons la rivière pour monter un peu plus haut sur des crêtes plus arrides et passer entre de beaux rochers sculptés. Nous rencontrons quelques familles nomades vivant dans de maigres maisons (ou peut être devrais-je juste dire abris) troglodytes avec leurs troupeaux. L'un d'eux (Mohamed, comme il y en a tant par ici) nous invite à boire le thé avec son fils et un homme a cheval de passage également. Il porte un élégant "turban" jaune sur la tête qui rend lumineuse sa peau dorée. Nous remercions Mohamed par un cachet d'aspirine, il nous explique son mal de tête par des signes et nous demande "fani fani"? (Nous en conclurons donc que "fani" veut dire médicament ou plutôt bonbon) (nb: les gens des villages perdues ou les voyageurs nous demande très souvent de l'aspirine ou un médicament pour la mal de tête ou de dent, ils savent que les voyageurs (occidentaux) en ont souvent dans leurs bagages...est-ce dû à un accès difficile? Physique, financier? On ne craque pas à chaque fois mais il est difficile de répondre négativement à une telle demande...du coup j'ai l'impression de jouer au pharmacien!)
Avec Mohammed, la classe!
La mule, le moyen de transport principal dans l'Atlas
Mohamed nous accompagne ensuite pour un petit bout de chemin en direction de Tasgawailt. Il me demande d'essayer mon bâton de marche et me prête en échange le bout de bois qui lui sert de canne. Il trace devant nous tout fier de son nouveau joujou, il y a même une dragonne, c'est vraiment fantastique. En arrivant près de son troupeau il nous propose de nous vendre un de ces moutons pour le manger à la broche, je lui explique tant bien que mal en lui mimant qu'il serait trop gros et trop lourd pour rentrer dans mon sac à dos. Lorsque nos chemins se séparent il demande s'il peut garder le bâton...la aussi je me retrouve à lui mimer que sa canne en bois a beau être très jolie, elle est trop petite pour moi et surtout plus petite que mon autre bâton! Il me le rend, déçue mais en rigolant! Décidément on est tombé sur le comique de la région! En tout cas ce fut une très chouette rencontre!
Nous continuons notre chemin et descendons dans les gorges pour retrouver la Tessaoute qui irrigue Tasgaiwaïlt. C'est l'occasion de faire une pause pique-nique à l'ombre et avec enfin un vrai torrent ! Pas un petit filet d'eau tout maigrichon, ni un ruisseau transformé en un tas de canaux d'irrigation. Ici le ruisseau est trop encaissé pour qu'il y ait de l'agriculture. Quel plaisir de trouver un tel coin, ou l'on peut tremper ses pieds, ses jambes sans scrupules! Une petite sieste à l'ombre laisse le temps aux nuages d'arriver et qui voilà? Voilà l'orage qui menace!
Admirez l'équilibriste !
Nous rejoignons Tasgaiwaïlt par une variante. À Tasgaiwaïlt les enfants nous sautent dessus...les premiers sont avec une maîtresse, ou plutôt une animatrice du centre de loisir je suppose car c'est les vacances. Ils sont très jeunes et sont souriants, intrigués de nous voir et joueurs. Les suivants que nous rencontrerons n'ont que deux mots à la bouche: "bonjour stylo". Pas de temps entre les deux, pas de ponctuation, ils enchaînent l'un avec l'autre comme si rien n'était plus normal. Lorsque nous répondons que nous n'en avons pas, certains nous demandent des sous et irons même jusqu'à nous suivre sur la route plus d'un kilomètre après le village. Difficile d'être à l'aise face à tant de pauvreté, à la fois aimable et souriant, mais il faut savoir rester ferme si on ne veut pas se laisser marcher sur les pieds. On nous a redis plein de fois de ne rien leur donner pour ne pas encourager cette mendicité qui en devient agressive... une solution pourrait être de donner des stylos à la maîtresse qui les distribuerait?
Les champs du village de Tasgaïwaldt
De plus, la fin de la journée n'est pas facile mentalement car depuis 2 ans une route relie Amezri et Ichbakene, nous effectuons donc les 5 derniers kilomètres sur du goudron. On trouve un petit terrain pour planter notre tente au bord de la rivière, non loin de Tizzi N’Ikkis. À peine avons-nous commencé à nous faire à manger qu'une jeune femme vient nous voir et nous explique que c'est chez elle...elle accepte que nous dormions ici contre quelques dirhams. Elle en profite pour nous demander si nous n'aurions pas de l'aspirine (une fois de plus!) et ...du maquillage ! Une demande fort étonnante lorsqu'elle est formulée par une femme de paysans dans un des coins les plus reculés de l'atlas! Malheureusement elle n'est pas tombée sur la plus coquette des occidentales!
Un petit dialogue à l’épicerie d’Amezri pour clôturer le récit de cette journée :
Un homme se tient devant l’épicerie. On lui demande s’il a du pain, il nous répond oui. On rentre donc dans l'épicerie, il nous suit et se place derrière le comptoir.
"vous avez du pain?
- non.
- ou est-ce qu'on peut en trouver?
- à la maison... combien tu en veux?
- trois!
- on a pas trois!
- combien tu en as? Un alors!
- (sans même bouger de son comptoir) un? ...non pas possible, les enfants l'ont mangé."
....c'est ainsi que s'achèvera notre conversation et faute de pain nous continuons notre route.
J4: Amezri – Taggourt : La journée de la défaite qui se finit bien.
Nous commençons la journée par une "merveilleuse" randonnée de 5/6km sur route, nouvellement goudronnée mais où aucune voiture ne passe (le stop ça aurait été trop facile). Mais bon il est tot, il fait frais, et nos jambes viennent d'être reposées alors passe encore!
Traversée d'Ichbakene!
En passant au village d’Ichbakene, une maman nous interpelle; elle me montre le genou de sa fille, un bobo bien infecté et me demande si je n’ai pas quelque chose. Après une brève hésitation, je pose mon sac et sors betadine, compresses, pansement. On a quand même bien fait de s'arrêter, ce n'est pas très beau à voir! Sous les yeux ébahis de la moitié du village, je lui désinfecte, explique à la mère qu'il faut qu'elle lave avec du savon et protège le tout d'un pansement. Après avoir joué à l'infirmière on pensait reprendre notre route, mais là ce sont les autres mamans qui débarqués, me montrant les moindres égratignures de leurs enfants! L'une d'elle nous apporte même un bébé atteint d'une impressionnante maladie dermatologique...ah non la désolée mais malgré mes quelques années d'études je ne vais pas pouvoir vous aider...Il faudrait que le nourrisson aille voir un médecin, mais cela leur paraît si loin lorsqu'il faut déjà faire 2h de marche avant de rejoindre une piste praticable en voiture, que aucun d'eux ne possède!
Les villages sont beaux, mais marcher dans le lit d'une rivière à sec c'est affreux!
Nous traversons Ichbakkene et descendons ensuite le loooonnng lit d'une rivière, malheureusement sans eau jusqu'a .......... un moment bien éprouvant car pas le moindre nuage n'a eu pitié de nous et nous n'avons même pas eu le droit à notre petit orage rafraîchissant de fin de journée, jusqu'ici quotidien. Et les surprises n'étaient pas terminées, de Ait Ali N’ Ito à Megdaz nous retrouvons une chère route goudronnée, sans arbre ni la moindre voiture. Bon vous voulez que j'arrête de râler? Et bien ça tombe bien parce que la chance nous sourit enfin! En arrivant à Megdaz, on s'arrête dans une petite épicerie pour acheter du pain; ils n'en ont pas mais le jeune qui la tient nous invite à prendre le thé chez lui. Sa maison, pas des plus pauvres, est située un peu en hauteur et nous offre une très jolie vue sur Megdaz, considéré comme le plus beau village de l'Atlas pour son architecture traditionnelle, et Taznakht, juste en face.
Megdaz, le "plus beaux village de l'Atlas"
Le thé nous est servi dans un immense salon, ou le sol est recouvert d'un tapis coloré entouré de cousins pour s'asseoir. Lorsqu'en partant on lui demande où est-ce qu'on pourrait trouver des fruits et légumes. On comprend alors que, comme pour le pain, cela ne s'achète pas en épicerie mais il faut se laisser inviter chez les gens et leur en demander, lesquels seront ravies de t'offrir leur production contre une petite pièce. Nous reprenons donc la route heureux d'avoir quelques vitamines de provision. La montée au col se fait assez bien (ça fait du bien de faire autre chose que du plat!) et nous descendons tranquillement jusqu'au petit village de Taghourt. Nous y sommes accueillis très chaleureusement par une horde d'enfants qui nous montre le point d'eau du village ainsi qu'un endroit (presque) plat pour planter notre tente. Chacun met ensuite la main à la patte pour planter les piquets. Les enfants sont ravis et nous aussi! Nous les remercions par un carreau de chocolat ! Ils rentrent ensuite au village car la nuit tombe. Deux groupes de 2 petits malins repasseront ensuite nous voir armés de leur lampe de poche pour nous mendier sous et bonbons.
Une longue journée difficile mais qui se termine sur de bons souvenirs!
La team "montage de tente" au complet (cherchez l'intrus, il dépasse un peu des autres....)
On commence par monter l'arceau
Puis les piquets!
Les filles sont un peu plus timides mais nous observent avec attention
J5 Tagourt – Tighza : journée des cols
Une journée de plus où le réveil sonne avant que le soleil ne se lève, on espère que cette journée marque la fin des doublages d’étapes. En se basant sur les parcours de différents randonneurs, nous avons noté qu’aujourd’hui c’était quitte ou double : il n’y a pas beaucoup d’endroits pour bivouaquer sur le parcours alors soit nous réussissons à avancer suffisament soit nous perdons toute l’avance que nous avons accumulé au cours de ces premiers jours…
Aujourd’hui c’est la journée des cols : nous devons en passer pas moins de 5 pour rejoindre le village de Tighza, objectif ambitieux de notre journée. Alors d’entrée de jeu nous nous perdons en cherchant le premier, le Tizi’n Tagourt. En effet, sur ce terrain aride et délité, seules quelques sentes faites par les chèvres se distinguent dans le paysage. Heureusement, quelques villageois nous remettent sur le bon chemin, et nous parvenons rapidement au premier col, d’où nous distinguons le second. A partir de là, le paysage est grandiose bien qu’effroyablement sec sur ces versants sud…L’orientation est également bien plus facile : aucun arbre pour cacher l’horizon. Aux alentours de midi, alors que nous poursuivons notre chemin de pélerins du désert sous un soleil encore plus cuisant que d’habitude, nous avons le bonheur de trouver un peu d’ombre persistante sous un surplomb rocailleux juste avant de franchir notre quatrième col de la journée, le Tizi’n Lemsalli. Ici, nous faisons un bon gueuleton, à base de maquereau et de comté, et nous procédons à une réhydratation. L’avenir nous apparaît alors sous de meilleurs auspices. Ici, contrairement à ce qui est indiqué sur le topo, nous ne redescendons pas sur Tamzrit pour y passer la nuit, nous restons à niveau pour tracer jusqu’à Tighza.
Jeux-concours : tentez de gagner 1000€ en trouvant le coin d'ombre ou nous pourrons faire notre pause de midi ... Ah bah non, il n'y en a pas!
Après la petite sieste réglementaire, il faut retourner au charbon, on ne va quand même pas crever ici hein ! Surtout que quelques nuages ont décidé de nous aider cette après-midi ! Pour notre cinquième et dernier col, nous avons le droit à une véritable moraine marocaine. Je suis évidemment fou de joie, je vais pouvoir continuer mon étude de ces merveilles de la nature, après toutes celles que l’on a pu bouffer au Pérou et en Nouvelle-Zélande ! Nous marchons à bon rythme, il ne fait pas si chaud, mais le col se fait désirer, ça redescend, ça remonte… Finalement, nous y arrivons, à 2820m, nous dominons toute la partie sud du paysage, et l’horizon se perd dans la brume, loin, très loin…
Nous descendons rapidement dans un petit pierrier avant d’arriver au lac Tamda…Un lac au milieu de ces étendues arides ? Et oui, et c’est même le plus haut du Maroc, à quasiment 2700m ! Au bord de cette source de fraîcheur, nous défonçons une galette, accompagnée de sa dose de nutella… Pendant ce temps, des marocains en vacances pêchent à la mouche sur les bords du lac, à l’aide ce cannes de fortune : une boîte de conserve sert d’enrouleur !
Le lac Tamda et son environnement plutôt minéral
On nous propose de camper là cette nuit, mais il nous reste encore un petit bout de chemin jusqu’à Tighza, et notamment un loooong faux plat descendant rocailleux qui n’avance pas… Les kilometres défilent et sont autant d’occasions de râler… Les journées se suivent et se ressemblent, chaque soir on se retrouve épuisé à devoir chercher un endroit correct pour bivouaquer ! Finalement après avoir trouvé une petite source, on décide de se poser une petite heure avant Tighza, au milieu de champs en jachère. L’endroit est plus que tranquille, et l’atmosphère apaisante. Les aventures ne se termineront qu’une fois couchés cependant : les nouilles du soir sont un peu beaucoup trop épicées au goût d’Anouk, impossible de manger ! Un petit rinçage des nouilles à l’eau claire lui permettra heureusement de se rassasier sans se bruler les papilles !
Peut être un des seul arbre du coin, mais il n'en est pas moins beau!
Les sources, plus esthétiques que nos robinets (mais aussi moins controlées!)
J6 De Tigza à Ouzlim en passant par Telouet
Au fil des jours, et avec tout ce que nous mangeons, les sacs vont en s’allégeant… Et heureusement, car le poids de la fatigue, lui, se fait de plus en plus lourd! Cependant, si nous transportons moins de boîtes de conserve, nous commençons à avoir une furieuse envie de produits frais, et il nous faut refaire un petit plein d’essence pour le réchaud. Nous comptons sur la ville de Telouet, sur notre route aujourd’hui, pour nous ravitailler. Dans notre esprit cette ville, étant l’ancienne cité du Glaoui, une espèce de souverain local, est censée être une cité d’abondance, belle, propre, remplie de denrées délicieuses… Bon, on verra que ce ne sera pas tout à fait ça, et que l’on s’est fait un peu trop de films !
La fin de la descente sur Tighza au lever du jour est délicieuse. Délicieuse d’abord parce que l’on peut se gaver des fruits prodigués par les vergers sur notre chemin, figues, pommes, noix… Ensuite parce que le paysage est un régal, on est au creux d’une petite gorge formé de rochers orange de toutes les formes, au milieu desquels coule un petit torrent clair, donnant vie à tous ces arbres fruitiers. Enfin parce que nous trouvons un petit trou d’eau dans lequel nous partons pour nous rincer les pieds et dans lequel nous finissons par faire une toilette complète plus que bienvenue ! Quel bonheur d’enfin trouver un coin à la fois discret et avec assez d’eau propre pour se baigner !
Première toilette du trek, on ne vous cache pas que ça fait du bien!
Nous achetons notre pain au village, une grosse galette qui paraît délicieuse, avant de nous élancer vers le col des Azib Tilkrit, un petit rallongi du topo pour nous éviter la route. Enfin on aurait peut-être du prendre la route en fait ! La suite de l’itinéraire s’est révélée être plus que merdique. Nous avons donc décidé de suivre le topo, plein de bonne volonté pour ne pas prendre la route. Mais nous commençons par nous paumer dans le village, et quand nous sommes enfin dans la bonne vallée, nous nous retrouvons 100 mètre trop hauts, pas du tout sur le chemin. Ainsi c’est avec ce maudit soleil qui tape déjà bien fort que nous retrouvons le sentier, plus sec que jamais, dans un canyon asséché avec une terre rouge qui réverbère la chaleur… Vous savez que les paraboles concentrent les ondes ? Ben avec la chaleur c’est pareil, il ne vaut mieux pas se trouver au fond d’une cuvette en plein cagnard !
La montée n’en est pas vraiment une, c’est long et plat, et bientôt il n’y même plus de sentier… Anouk est à bout de nerf, je lui conseille d’adopter ma technique du blindage total, t-shirt mouillé sous le chapeau, isolation maximale pour conserver un peu de fraîcheur !
Le nouveau look de chez coco-fraicheur (parlez lui en, il vous persuadera que son invention est révolutionnaire!)
Autre méthode pour se protéger du soleil: le style local
Arrivés au col, pas plus d’ombre, il nous faut tracer dans la descente, et nous maudissons le topo et son foutu itinéraire ! Enfin, au terme d’un énième push entre 12h et 14h dans les cailloux, nous atterrissons dans la vallée souhaitée, dans le petit village de Tasga surplombé par une belle citadelle en terre rouge. Nous déjeunons dans le jardin d’une auberge de jeunesse de luxe, visiblement fermée, sous de grands arbres et avec le ruisseau coulant près de nous, peinards.
Pas si peinards que ça, car les petits filous marocains viennent nous quémander des bonbons et des stylos d’une manière toujours plus directe et moins polie… Devant notre refus on se voit répondre « FAKYUMITCH ». Au bout de quelques itérations, on comprend qu’ils cherchent en fait à dire « fuck you bitch » ! Eh ben en anglais, il va falloir faire des progrès !
On repart pour une bonne section de plat qui passe pas si mal jusqu’à Telouet…Et là…il faut dire que la ville n’est pas vraiment conforme à ce qu’on avait imaginé ! Il est 17h, on est arrivés trop tard pour le souk local, et il ne reste que quelques fruits et légumes dont personne n’a voulu…. Alors nous on les prend hein. Ensuite, on arrive à comprendre que pour l’essence il va falloir en chercher au café. Ainsi au Maroc on n’a pas le droit à l’alcool dans les bars, mais l’essence c’est ok ! Le problème du carburant est donc résolu, nous allons pouvoir poursuivre notre voyage. Il faut savoir également que vu que nous avons géré comme des quiches, nous passons notre temps à compter nos sous ! Il n’y a absolument aucun distributeur de billets sur tout le parcours de la traversée, et nous n’avions pas assez retiré pour être vraiment large… Alors on se fait plaisir avec modération, un petit coca par ci, un petit fanta par là… Même si normalement nous ne sommes pas trop fans de ces caprices d’américains, nous sommes très contents ici de pouvoir boire quelque chose de frais et régénérant !
Nous repartons chargés de pommes, tomates, carottes et autres yaourts…Pas vraiment optimisé niveau poids, mais nos ventres s’en réjouissent d’avance ! Ce soir gueuleton ! La section de route qui suit est monotone alors nous faisons preuve d’inventivité pour faire passer le temps… On invente des jeux, on se fait des devinettes, on se raconte des blagues… Tout y passe ! Après quelques kilomètres, un peu avant d’arriver à Ouzlim qui est le village indiqué sur le topo pour passer la nuit, nous demandons notre chemin à une dame, pas vraiment locale finalement, mais formidablement gentille, parlant le français et nous invitant à boire un thé sur sa terrasse. Il est 20h, nous acceptons avec grand plaisir, tout comme les tartines beurre/confiture qui viennent avec. Nous discutons un peu, et elle nous annonce que l’on peut planter notre tente en face de chez elle sans souci !Au cours de cette traversée ce sera souvent comme ça, de dures journées mais dont on ne garde le souvenir que des petits moments de partage passés avec les locaux !
J7 Ouzlim-Afra
Cette septième journée marque la moitié de notre épopée : nous allons en effet atteindre la route du Tizi n’ Tichka, col routier séparant le haut Atlas central du haut Atlas occidental vers lequel nous nous dirigeons.
En traversant Ouzlim, nous nous ravitaillons en eau dans la maison d’une villageoise attendant pour vendre le lait de ses vaches en compagnie d’une dizaine d’autres.
C'est pas le super marché! Ici c'est un bidon = une vendeuse!
Pour arriver à la route du Tizi n’Tichka, il nous faut franchir un autre col, le Tizi N’Mahboub. La montée à celui-ci est très agréable, la vallée est très encaissée au début, nous permettant de profiter d’une certaine fraîcheur matinale. Un beau ruisseau coule au fond de la vallée, donnant vie à aux chardons et autres plantes épineuses dont se délectent quelques troupeaux de chèvres ! Au col, nous faisons un rapide détour pour atteindre un petit sommet voisin, et contempler l’immense paysage qui s’offre à nous. Nous découvrons la suite du chemin, et on distingue au loin le plateau d’Afra, vaste étendue herbeuse, un oasis de verdure au milieu de la caillasse. Pour le moment, on va y passer dans la caillasse. Nous traversons au nord-ouest pour rejoindre une grande pente de terre et de poussière ! On s’en met plein les baskets en fonçant droit dans la pente, mais au moins la descente est vite avalée. En revanche, on se rend compte que l’on a perdu le chemin, déjà pas bien marqué avant… Bon, on va improviser, on descend dans une gorge asséchée, profitant de notre expérience acquise dans le domaine à Taghia. Après quelques petits pas de désescalade pour ne pas s’ennuyer, on retrouve un vague sentier, mais il fait chaud, trop chaud, et on a déjà faim ! Ben oui, il est midi, on est réglé comme des horloges ! Dans ce vallon, impossible de de trouver quelque arbre que ce soit, on se réfugiera dans un azib (une bergerie), abri sommaire mais avec un toit pour prendre le soleil à notre place. On démonte notre saucisson, comme des enfants pillant la réserve de biscuits de la maison, on se sent à moitié coupable de manger du halouf ! Une grosse sieste au milieu de la poussière, et nous repartons pour atteindre rapidement la route nationale et de l’autre côté, le café Assounfou ! C’est un gros choc de retrouver autant de voitures et un café avec pizzas, boissons et tout ce dont avait perdu l’habitude depuis une semaine, traversant de villages perdus en villages perdus. On ne résiste pas à l’appel d’une bonne pizza et de deux jus d’oranges pressés, bien qu’ayant déjà mangé il n’y a même pas deux heures ! On doit avoir un peu d’énergie à récupérer… Ce petit interlude a le goût du bonheur, on a fait la moitié du parcours, la plus exigeante, à présent nous allons rencontrer des vallées plus vertes et plus peuplées, et au bout du chemin on se voit déjà au Djebel Toubkal ! On prend notre temps, une vague toilette car on est aussi poussiéreux que des gobelins revenant de la mine. On détonne au milieu des quelques touristes marocains, visiblement fortunés, enchaînant selfie stupide sur selfie crétin.
La suite de l’itinéraire passe au-dessus des gorges, aménagées pour le passage d’un ancien télépherique servant à la mine locale. On se fait accompagner par un jeune habitant d’un village voisin, offrant un bracelet à Anouk et nous indiquant 2-3 petites astuces pour le chemin sur le plateau d’Afra. En débouchant sur le plateau, une jolie cascade nous fait de l’œil, personne à l’horizon, on quitte notre compagnon et l’on court vers la promesse d’une douche, d’une machine à laver, d’un lave-vaisselle, 3 en 1, et 100% naturel ! Même en ayant surchaud depuis le début de la journée, on trouve l’eau glacée, mais qu’est-ce que ça fait du bien ! On en profite pour faire une grosse lessive et rincer un peu la popote, elle en a bien besoin !
Des fonds de vallée toujours aussi verts
La tant espérée douche / machine à laver / lave vaisselle
Enfin, bien rafraîchis, on se dirige vers un futur emplacement de bivouac, pas trop dur à trouver, et pour cause, l’endroit est plat et herbeux sur des hectares. L’ambiance est très chouette pour ce coucher de soleil, ça nous réchauffe le cœur de se trouver au milieu de l’herbe après tant de bivouacs dans la terre. Avant de se coucher, Anouk étend le linge à la marocaine, à plat sur les hautes herbes. Je m’interroge sur le résultat en cas de fort vent…
Étendage écologique!
A ce point-là, on se dit que l’on ne va jamais aussi bien dormir… Erreur fatale ! C’est bien le vent, parfaitement absent à la tombée du jour, qui va apparaître et beaucoup trop forcir au cours de la nuit. Difficile de fermer l’œil quand on essaie d’arracher votre tente… (sans vous parler de notre linge étendu dehors...)
J8 Afra-Ouarzazt
C’est donc absolument pas reposés que nous nous levons sur le plateau d’Afra, nous ne prenons pas le temps de déjeuner, le vent nous rend complètement fous. On se sent vides, mais on avance jusqu’au village d’Afra, où nous espérons trouver un lieu un peu plus à l’abri. Mais on trouvera mieux que ça : en traversant le village, un vieil homme à sa fenêtre, comme s’il nous attendait, nous propose de partager le petit-déjeuner de sa famille. Affamés, nous acceptons avec plaisir. Nous réalisons à quel point la vie est difficile dans ces villages. Le déjeuner est très simple, mais nourrissant, bouillon d’orge, thé, et la traditionnelle galette trempée dans l’huile d’olive. La cuisine est constituée d’un simple réchaud à gaz et de quelques casseroles, en guise de sièges des sacs de terre. La famille dort à même le sol, à quatre dans la même chambre. Ce contraste entre tant de dénuement et toute cette gentillesse, cette hospitalité, nous remplit le cœur ! On doit même insister à plusieurs reprises pour leur faire accepter quelques sous pour le pain qu’ils nous ont donné!
On repart bien ragaillardis, après tout on n’a pas le droit de se plaindre vu le confort dans lequel on vit même en tente, par rapport à ces villageois démunis !
Nous cheminons ensuite dans une vallée encaissée bien agréable, beaucoup d’arbres sont au rendez-vous et l’on trouve de l’eau régulièrement pour se rafraichir. Nous passons plusieurs villages paisibles, aux habitants toujours prêts à vous donner un conseil, qu’il soit bon ou non…
Nous empruntons ensuite une portion de piste, ça nous casse toujours autant les pattes, et à la descente on décide de couper les lacets… On se retrouve à bartasser dans du terrain moisi, mais nous arrivons rapidement sur Azgour : une rivière, de l’ombre, l’endroit est validé pour la pause méridienne ! Nous absorbons tout ce dont notre estomac est capable, c’est-à-dire beaucoup ! Après plus d’une semaine de trek, notre corps nous supplie de le nourrir toujours plus !
Lorsque nous repartons, nous devons encore effectuer une section de route. Eh oui, avec le développement du Maroc, il y a de plus en plus de goudron dans les montagnes de l’Atlas ! Cela facilite la vie des villageois (encore que, il semble passer une voiture par jour sur ces routes…), mais pour nous autres pauvres trekkeurs de passage, si nous voulons éviter les portions de macadam, il nous faut faire de bons détours ! Bref, quelques kilomètres de route en plein cagnard, pour rejoindre une piste remontant sur le village d’Ikkis (un nom de village rencontré au moins 4 fois au cours de notre périple !), complètement deserté l’été, les villageois effectuant une migration saisonnière vers le village d’Ourzazt, notre prochaine étape. Une petite pause cacahuètes dans ce village fantôme avant d’attaquer le long col du Tizi’n Oudfi. Il est assez tard et il fait bon, nous avançons motivés et avec une conversation animée. A mi-chemin, nous nous faisons doubler par un vieillard sur sa mule avec des lunettes ray-ban, chouette une présence de vie dans cette vallée déserte ! Au col, la vue est magnifique, les montagnes aux alentours sont assez raides, le paysage se rapproche de ce que l’on connaît dans les Alpes, alors on est content ! Tout ce chemin pour chercher la même chose que chez nous…. Du côté où nous nous dirigeons, la vue est tout autre : les trois petits villages d’Ourzazt, disposés en triangle autour de la mosquée centrale, et eux même entourés par des champs en terrasses, à perte de vue. Avec la lumière du soir, ce paysage rural est somptueux !
Les 3 villages de Ouazazt
On descend sur le village en compagnie de quelques muletiers, et on se retrouve à l’épicerie du village pour refaire un peu les stocks de mangeaille ! L’épicier ne parle pas un mot de français, alors on se débrouille avec notre petit guide de conversation berbère, pour obtenir 2 oignons, un peu de semoule et deux boîtes de sardine ! Il nous indique également de manière très sympa un coin pour dormir : dans le jardin de la mosquée ! Au moins, on sait qu’avec l’appel du muezzin à 4h du mat, on sera réveillés… On se fait une bonne petite soupe à l’oignon improvisé, accompagné d’une grosse part de semoule, et hop, au dodo !
J9 : Ouarzazt-Setti Fadma
Comme prévu, les appels à base de « ALLAH AKBAR » nous réveillent à 4h, mais nous décidons de faire durer un peu la nuit, on en a bien besoin. Un bol de céréales plus tard, et on décolle vers 8h, direction les plateaux herbeux au nord du Meltsene (3600m). Le topo nous dévoile que sur le chemin, nous pouvons partir à la recherche de gravures rupestres datant de 2500 av. J.C. C’est donc avec l’esprit d’Indiana Jones que nous suivons les indications « 10 pas à l’Est, 50 pas au Nord, vous trouverez des lézards jumeaux… ». Les gravures sont en excellent état malgré leur âge quatre fois millénaire, et la confrontation face à ces vestiges de nos ancêtres est magique : ici on n’est pas dans un musée, on est dans l’ambiance même où ces artistes ont décidé de laisser leur trace. On se dit que notre chemin paraît bien petit par rapport à tout ce que l’espèce humaine a déjà parcouru !
Corentin analyse le calendrier solaire
Vous les voyez les lézards jumeaux?
L'été, les populations montent vivre dans les bergeries avec leurs animaux pour profiter de la "fraicheur" des montagnes
Des gravures de haches, de disques solaires, des hommes-boucliers, il y a un peu de tout, le site est vraiment exceptionnel. On repart en passant par des gravures géantes de vaches, direction…une autre vache justement ! En effet, en traversant le village suivant, on aperçoit parmi de nombreuses vaches paisibles, une vache qui elle est carrément folle furieuse ! Elle rue de partout, cabre, attaque ses congénères, quand soudain elle décide de s’en prendre à nous, un peu paumés au milieu des champs du village. Courir paraît vain, surtout avec nos énormes sacs, une seule solution : faire face ! Mais bon, faire face à un animal en furie 5 fois plus lourd que soi demande une certaine dose de sang-froid….Lorsque je me retrouve les deux mains sur la tête de la vache folle à tenter de la repousser, je me dis que celle-ci doit être la version ruminante de notre sarko national en terme de hargne et de crétinerie. Finalement, on arrive à se faire oublier de la bête, que l’on voit galoper en cabrant à travers les champs à la recherche d’un nouveau venu pour faire passer sa rage.
Cet épisode est l’occasion de se raconter des histoires d’animaux qui font peur, mais on ne peut emêcher notre esprit de divaguer dans ce cadre magnifique, des steppes vertes parsemées çà et là de blocs de grès rouges, dans un cadre définitivement montagne, avec le Meltsene trônant au-dessus de nous. Malgré la beauté des lieux, dès que les onze coups de onze heures ont sonné sur ma montre altimètre si précieuse (oui elle fait aussi cloche d’église dans ce pays de mosquées), il fait définitivement trop chaud, on se met en quête de notre spot de sieste. On repère un grand groupe de cavaliers posés dans une gorge, au bord de l’eau, bien à l’ombre : on se dit que ça doit être pas mal ! On trouve un bloc en gros dévers digne de Rocklands pour l’ombre, avec une petite source à deux pas, et vue sur les chevaux qui se détendent : on est pas mal non plus. On ponce nos réserves de bouffe, car ce soir, on est à Setti Fadma, la GRAAAANDE ville !
Chacun reprend son chemin après la pause de midi
Nous repartons tranquillement, l’étape n’est plus si longue à présent, il reste simplement à se laisser glisser (si l’on peut dire) sur un petit kilomètre de déniv jusqu’à la route. Entre temps, on aura le droit à quelques gouttes de pluies rafraichissantes, un vrai bonheur, à des embouteillages de vaches sur le sentier, et un petit fourvoiement dans la descente…
Plus on approche de la route, plus le choc est fort : on passe du calme et de la ruralité des montagnes à la grande foire touristique de ce weekend de moussem (la fête estivale locale, traditionnellement associée aux mariages…). Des centaines et des centaines de citadins marocains venus prendre le frais en montagne, venus de Casablanca, Marrakech, Ouarzazate… Les pieds dans l’eau, et les canapés aussi ! Devant ce joyeux bocson, on hésite à remonter la route à pied avant de comprendre que l’on a une chance sur deux de mourir écrasé par une voiture avant d’arriver au centre de Setti Fadma ! Notre éthique en prendra un coup mais on fera du stop sur 3 km, et nous arriverons finalement assez tôt dans un bon hôtel bien confortable ! La civilisation est de retour ! Douche, wifi, restaurants… Tout y passe, et on en profite à fond, après cette dizaine de jours au régime sec !
Les bars ont trouvé la bonne solution pour avoir de la fraicheur
C’est donc avec un ventre bien plein de tagines et de pâtisseries que nous irons nous coucher dans de bons draps propres !
PS de fin de journée :
Voilà comment on doit négocier pour l'heure du lever au Maroc...
Au gérant de l'hôtel qui nous vend son truc:
- Par contre on voudrait partir tôt...
- pas de soucis, 4h du matin si tu veux!
- heu non ça ira! Disons 7h! (Nb c'est une grasse mat pour nous!)
- 7h30 / 8h ? D'accord!
- (à voix basse) bon ben va pour 7h30 ! Grrrr
J10 : Journée canyoning jusqu’à Timichi
Apres cette nuit d'hôtel, on se sent a la fois reposes et en même temps on sent toute la fatigue accumulée jusque-là avec une seule envie, se poser! Un départ donc tardif, mais ça devrait le faire, ce n'est pas une grosse journée qui nous attend… Cependant celle-ci s'annonce pénible car faite de route goudronnée, de piste et encore de piste...tout ce qu'on aime!
La première partie sur la route se fait rapidement, notre attention est portée sur les occupations de chacun, à droite à gauche de la route; ça fait du bien de retrouver un peu de civilisation, de gens, de touristes, marocains certes mais ça change des villages ou tout le monde se retourne sur notre passage, à la fois curieux et quelques fois envieux, de notre vie différente ou de notre matériel peut-être?
Nous arrivons à un embranchement, nous choisissons de remonter la rivière même sans chemin plutôt qu'une piste en plein soleil. Et nous sommes très vite contents de notre choix! Une fois qu'on s'est mis en tête que ce n'était pas grave (comprendre par là qu'on met volontairement le pied en entier dans l'eau), rien n'est plus facile. On remonte ainsi la rivière pendant quelques kilomètres, en repensant à celle qu'on a descendu pour arriver à Tasgawaïlt quelques jours auparavant...c'est fou comme ça change tout d'avoir une vrai rivière, avec un volume d'eau important, et donc de la végétation verdoyante aux alentours plutôt qu'un lit de rivière à sec, avec pour seule eau quelques flaques stagnantes remplie d'insectes et de sortes d'algues vertes stagnantes. C'est donc avec enthousiasme que nous remontons le cours d'eau, nous sommes même séduits par un petit trou d'eau au milieu des gros blocs de granit qui nous invite à nous baigner. Petite trempette, en dehors des sentiers battus, tous seuls au fond de notre gorge, fort sympathique! En continuant notre route, nous rencontrons des singes, des macaques de barbarie pour être exacte. Quelle surprise de les trouver la! L'agilité dont ils font preuve est impressionnante, ils courent, sautent, des "run and jump" les uns à la suite des autres comme diraient les grimpeurs. Les petits sont agrippés au ventre ou au dos de leur parent pendant que ceux-ci crapahutent sans peur.
Canyoning en montée
Petite baignade fort rafraîchissante
De fil en aiguille, nous arrivons aux abords d'Anfli où nous croisons un homme et lui demandons si nous sommes bien ou nous pensions être. Il venait en fait à notre rencontre...il s'agit en fait d'Ibrahim, qui tient un gîte à Timichi, et que notre hôte de Setti Fadma nous avait recommandé si on voulait s'arrêter dans ce village. Et c'est là tout le problème! Ici si l'on vous recommandé un gite au village suivant, ça veut en fait dire qu'on réserve pour vous le gîte pour la nuit suivante et que le propriétaire vient à votre rencontre en mobylette, ne vous croisant pas sur la route, jusqu'à l'hôtel dont vous êtes pourtant bien parti le matin même, se dit que vous êtes passés par la rivière, retourne chez lui, pose sa mobylette, prend son sac à dos et vient à votre rencontre à pied. Tout cela sur plusieurs kilomètres et sans que vous ayez promis ni envisagé le moindre arrêt à ce gite! Bon du coup nous lui expliquons la situation et se laisse inviter à boire le thé. Aucun problème pour lui si on ne reste pas mais tous ses arguments sont quand même en faveur d'une nuit ici, à Timichi. Nous nous laissons finalement convaincre, après une longue hésitation: plutôt que de monter au col prévu sous la chaleur de fin de journée, on en profite pour se reposer un peu (enfin!) et nous attaquerons le fameux col demain avec la fraîcheur de l'aube. Nous finissons donc la journée par une petite sieste, un peu de lecture/écriture (enfin le temps!) puis un bon petit couscous. Tout pour bien répartir le lendemain !
J11 Timichi-Imlil
Corentin m'avait dit la veille "demain il va falloir se mettre en mode course". Ca s'annonçait bien...
Le réveil se fait comme prévu aux aurores, petit déjeuner rapide et nous voilà prêt à repartir, les baskets aux pieds, le sac sur le dos. Il fait tout juste assez jour pour ne pas avoir à sortir les frontales. Nous passons Iabassene puis nous doublons rapidement un puis deux groupes de randonneurs s'étant aussi levés tôt pour attaquer un des derniers cols qui nous restait, le Tizi n'Tarcheddirt. Nous croisons le cuisinier de l'un des groupes avec qui on a sympathisé la veille. C'est un vrai petit cabri, il court devant et cherchant à faire la course avec tous ceux qu'il rencontre. Dès que je suis un peu à la traine (et pour cause, j'ai juste une bonne dizaine de kilo sur le dos en plus de lui!), il lance "bah elle est fatiguée la gazelle?" Sacré cuisinier! Il ne fait pas encore (trop) chaud et nous avalons assez rapidement les 1300m de dénivelé, raide et direct comme on les aime! Ça y'est, Imlil nous paraît tout proche, on devrait y être ce soir, ce lieu qui nous paraissait pourtant si loin depuis notre départ, 11 jours auparavant. Rassurez-vous on est presque arrivé à destination mais on ne manquera pas l'occasion de vous ramener un petit sommet pour occuper les deux jours qu'il nous reste! On enchaîne donc sur la descente du col, pour attaquer avant que le soleil ne tape trop, la fin de l'etape par notre activité favorite, la marche sur route !! ❤ En effet Tacheddirt et Imlil sont reliés par la route moyennant un petit col, ce que nous préférons à un long détour par les villages.
Descente dans la vallée
Nous voilà enfin à Imlil, et on en profite! Des fruits, une glace, des pâtisseries…on se venge des 10 jours sans excès que nous venons de passer! On va aussi boire un coup et se poser dans un café "nature", à l'ombre sous les noyers. L'homme qui nous accueille nous saute dessus en nous demandant "Grenoble"? oui, Grenoble mais comment a t il deviné?? Bon en fait il n'a rien d'un devin mais la majorité des français avec un sac sur le dos et une allure de randonneur viennent de Grenoble!
Début des emplettes à Imlil
La fin d'après-midi arrive et nous quittons la "ville" (tout est relatif quand ça fait 10jours qu’on n’a pas croisé de voiture!) pour rejoindre Aroumd, un petit village à un quart d'heure de marche où on nous a dit qu'il était possible de planter la tente. On se met donc en route, malheureusement nous sommes à contre sens : c'est la fin de la journée et les gens rentrent de leur journée dans la fraicheur environnante, pas facile donc de se frayer un chemin! Enfin jusqu'à que nous rencontrions cuisin-man, notre ami cuisinier qui aime tant gambader devant! Il s'étonne en rigolant "encore vous?" Son groupe s'est déjà installé au campement, lui est redescendu à Imlil pour acheter un poulet pour le diner du soir. Il nous invite donc à le suivre pour nous montrer le spot de bivouac du coin. On le suit donc, enfin on essaye parce qu'il avale les marches à une vitesse assez impressionnante!
Malgré nos 1400m de déniv dans les pattes et nos sac à dos de 15 bons kilos (c'est ça d'avoir voulu acheter des tomates, des carottes, des pèches, du yaourt), aucune pitié, il ne ralentit pas! J'arrive au lieu de campement rouge pivoine, essoufflée comme si je venais de courir 10km! "elle est fatiguée la gazelle?" Ah là oui, elle est bien fatiguée! Je réponds par l'affirmatif et ajoute que Corentin sera obligé de tout faire ce soir, planter la tente et faire à manger! "oui il va s'occuper de tout (super on est du même avis!), de toute façon après à la maison il pourra se reposer, c'est toi qui t'occupe de la cuisine non? (mmh là on est plus très d'acccord! Encore des mentalités bien différentes!)
S’en suit le sempiternel rituel plantage de tente-préparation du repas, mais pour une fois nous ne sommes pas les seuls français dans le coin, puisqu’il y a avec toute l’équipe de français rencontrés au col !
Le village d'Amround vu de notre campement
J12 Imlil-Refuge du Toubkal
Ce jour nous prenons la direction du Toubkal, avec la première étape: monter au refuge. Il y a pas mal de dénivelé mais "que" 4h de marche car peu de distance! Un effort qui se rapproche plus de ceux qu'on a l'habitude de faire dans les Alpes. La première partie du trajet est très fréquentée, car sur la route se trouve Sidi Chamharouch, un sanctuaire musulman. Beaucoup de gens s'y rendent pour consulter le marabout ou viennent se baigner dans l'eau sacrée, qui descends en cascade de la montagne, pour se débarrasser de toute sorte de maladie ou problème. Beaucoup montent sur le dos des mules. D'autres montent aussi pour la beauté des lieux et se baigner dans les petites vasques que forment le ruisseau. Le chemin continu mais les petites paillasses touristiques vendant jus d'orange et sodas ne s'arrêtent pas pour autant, il y en a encore 2 ou 3 avant d'arriver au refuge. Ça fait bizarre de voir les montagnes aussi fréquentée et aménagée pour le touriste mais en même temps c'est un concept qu'on apprécie bien à la descente quand vos jambes ne vous portent plus. On mettrait bien une petite paillasse à jus d'orange dans le vallon de Bonne Pierre nous! ;)
Lorsque nous arrivons au refuge, on s'attendait à voir du monde mais quand même pas autant! Déjà il n'y a pas un mais deux refuges, un du CAF et un plus classe en dessous. Autour sont plantées pas moins de 49 tentes ! Des petites, des grandes, il y en a pour tous les gouts!!
Le sanctuaire de Sidi Chamharouch au premier plan, il faut ensuite remonter la vallée de droite pour trouver le refuge
Une petite étude sociologique des phénomènes marchant rencontrés :
- une mamie sur son âne avec un muletier courant à côté, crillant en boucle "yala yala" à la mule, le tout suivi de "selfie-man" (baptisé ainsi par nous-même) qui suivait et filmait la scène avec sa perche à selfie.
- un homme avec un sac à dos et une tente accrochée dessus, sa fille sur les épaules et une bouteille de gaz (les grosses comme vous avez relié à la gazinière dans votre cuisine) à la main!
- des femmes en tatanes léopard hautement techniques (s'arrêtant au marabout mais ça fait quand même une grosse heure de marche)
- des MUL ("marcheur ultra légers") enfin presque parcequ'ils montent au refuge avec une tente 2secondes sur le dos!
- les grands sportifs qui partent pour le sommet à 9h pour être sur de le faire en plein cagnard et, alors qu'ils sont encore environ 200m au-dessus du refuge et que nous descendons: "c'est encore long?" Mmmh comment dire....
Nous sommes juste au-dessus du refuge, à la recherche du moindre coin d'ombre, lorsque que notre oeil est attiré par un groupe de 3 hommes...que font-ils? Et bien ils découpent la pauvre petite chèvre qu'ils viennent d'abattre! Au bord de la rivière, l'animal posé sur un rocher, sans gants, sans tablier ni la moindre mesure d'hygiène! Ils sortent l'estomac et le long tube digestif qu'ils vont vider et laver...dans la rivière!
Au cours de l’après midi, je (Corentin) tombe plutôt bien malade... Une grosse fièvre, mal au ventre, froid alors qu’il fait ultra chaud : je passe donc l’après-midi à comater en espérant une amélioration avant le lendemain… Mais l’amélioration ne vient pas, et je me couche shooté aux anti-inflammatoires, substances auquelles je ne touche qu’une fois l’an… Le Toubkal va devoir se mériter !
J13 Toubkal-Retour Marrakech
5h, le réveil sonne. Notre sur-motivation de faire le sommet en "courant", d'avaler les 900m de dénivelé restant en une grosse heure (enthousiasmés par la légèreté du sac!) s'envole brutalement. Ce matin, nos ventres en ont décidé autrement... Nous avons les intestins en compote et Corentin a toujours autant de fièvre que la veille. Tant bien que mal, nous avalons notre ultime bol d’avoine de l’année accompagné d’un petit thé pour réhydrater les organismes, et nous partons pantelant vers notre dernier objectif. Malgré notre état pitoyable, on sent l’avantage de maigrir de 15 kilos d’un coup en laissant nos sacs derrière un gros caillou ! On se sentirait presque voler ! Une petite section de pierrier droit dans le pentu laisse place à une section de pierrier à plat, qui elle-même laisse place à une nouvelle section de pierrier en lacets. C’est varié on vous dit. On double pas mal de marcheurs, incroyable alors que l’on ne s’est jamais senti aussi mal. Certains ne sont pas au top avec l’altitude et n’ont sans doute pas trop l’habitude de ce genre d’efforts. Le jour se lève petit à petit et après une petite heure nous sommes déjà à quelques encablures du sommet. On remonte une dernière crête, et Anouk qui se sent mieux trace devant pendant que je subis derrière … Quelle idée d’aller faire un 4000 en étant à moitié grippé !
Une demi-heure après, c’est fait, nous voilà au sommet du Maroc ! Quel n’est pas notre étonnement de retrouver la personne qui nous paraissait avoir le moins de chance de parvenir là-haut : la marocaine en gros gros surpoids qui peinait à monter les escaliers du refuge la veille ! Et cette fois pas de mules pour l’aider, elle s’est portée elle-même au sommet ! Chapeau, une belle démonstration de détermination.
La pyramide du sommet bien mérité (PS: vous avez vu, on fait la même taille ;)
Au sommet, je ne me sens vraiment pas au top et je dois reprendre un petit cachet si je veux parvenir à faire la descente. Une petite sieste s’impose, pendant qu’Anouk contemple la vue magnifique, à 360° : eh oui, ici rien pour obstruer l’horizon ! Avec ce soleil encore matinal, les autres montagnes brillent d’une belle lumière orangée. Les photos prises, on attaque la descente histoire de ne pas rentrer trop tard sur Imlil (et donc en plein cagnard vous l’avez compris). Sur le chemin, c’est un peu la cour des miracles, je n’ai jamais vu autant de monde en montagne, et encore moins sur un 4000 ! On retrouve de sympathiques allemands croisés la veille, avec des amis dont l’une ne se sent pas bien à cause de l’altitude, on la descendra donc avec nous jusqu’au refuge ! Evidemment, en étant à 6000 il y a moins d’un mois, de notre côté ça va plutôt pas mal si l’on omet la fièvre et le mal de ventre.
Et voilà, le dernier sommet de la voix des Cimes est dans la poche, c’est quand même pas tous les jours que l’on fait le point culminant d’un pays (avec 3 réalisations, il en reste quelques-uns pour compléter la collection…)
La descente sur Imlil est abominable pour ma part, j’ai froid alors qu’il fait plus de 40°C et je dois m’arrêter régulièrement pour récupérer. On fera une petite pause au sanctuaire du Marabout pour manger un (mara) bout et boire un petit coca (à quand une vraie bière !?). Et finalement…Imlil, enfin !
On décide de se poser comme des loques au même café que l’autre jour, mais cette fois encore plus posés, allongés sur les tapis pour boire un dernier petit thé berbère accompagné de quelques grillades. Avant de repartir pour Marrakech en taxi, Anouk décide d’acheter du miel, voilà son récit de cette aventure épique :
« Je rentre dans un petit magasin de produits locaux et décide d'acheter un pot de miel. Le vendeur ouvre le grand pot et commence à remplir mon petit pot. Les abeilles tournent autour, là, à l'intérieur du magasin. L'une d'elle tombe dans mon pot et y reste collée, zut! Je dois ensuite faire l'éventail avec le couvercle pour que d'autre ne reproduisent pas la même erreur! Une fois remplie, il met le couvercle et le sécurisant avec du scotch, il fait tomber le pot par terre. Il y a du miel partout par terre, avec les abeilles prisent au piège qui se débattent comme elles peuvent en battant des ailes. Il ramasse le pot, nettoie l'extérieur collant et recommence à le remplir. Une fois plein, il se rend compte que le pot (en plastique) est fissuré et fuit. Le gamin arrivé après moi, qui attend pour payer son pauvre paquet de bonbons, me lance un regard amusé… Il va chercher un nouveau pot chez son voisin, transfert le premier pot dans le deuxième, et le referme. Corentin m'attend depuis 30 min devant le magasin, et l'heure de notre bus se rapproche à grand pas. Enfin terminé! Je paie et le remercie, laissant derrière moi le pauvre vendeur qui a vendu un demi-kilo de miel et en a maintenant tout autant sur carrelage de sa boutique! »
Epilogue
Après cette dernière péripétie, nous partons enfin de l’Atlas en ayant bouclé notre traversée ! Victoire ! Une bonne heure de taxi en mode sauna et nous revoilà à Marrakech, capitale du royaume de la pâtisserie ! Dès le soir, nous y retrouvons Saïd, venu nous remettre tout notre matos d’escalade, au top. Nous suivons les conseils des villageois de Imlil, à propos d’une fameuse rue de Marrakech proche du centre-ville où l’on peut trouver des hôtels au bon rapport qualité-prix… Et nous nous retrouvons dans un riad des plus luxueux, pour un prix plutôt modeste… Et voilà, nous sommes au paradis, repos et nourriture en quantité nous attendent !
C’était une grande bambée, ambitieuse et exigeante, mais nous avons réussi à boucler cette traversée en autonomie, et en doublant certaines étapes du topo. Nous avons atteint nos objectifs, réaliser l’ascension des deux sommets majeurs de la chaîne, M’Goun et Toubkal ! Mais au-delà de ça, on en retiendra le plaisir de marcher librement (nous n’avions jamais évolué aussi longtemps en rando), des paysages sublimes et auquels nous ne sommes pas habitués, et surtout, surtout… Des rencontres magiques ! Eh oui, l’Atlas brille tout particulièrement par ces habitants, ces berbères si gentils et accueillants ! Longue vie aux montagnards marocains !
Un des souks de Marrakech, un lieu haut en couleurs
La place centrale de Marrakech, Jemaa el Fna