top of page

We knocked the bastard off !

Il est 9h du matin ce lundi 30 janvier et nous sommes suspendus entre ciel et mers au sommet du Mont Cook, alias Aoraki. Inspirés par les mots de Sir Edmund Hillary au sommet de l'Everest, nous n’hésitons pas, à notre humble niveau, à copier sur la légende. On l'a eu ! Notre premier véritable sommet en Nouvelle-Zélande, et pas des moindres. Tant qu’à être à l'autre bout du monde, autant grimper sur le plus haut sommet du coin. Et, tant qu’on y est, autant être les premiers de l’année 2017 par la même occasion ! Le succès de notre entreprise était pourtant loin d’être gagné d'avance, et c'est avec circonspection qu'on a pris le chemin des glaciers vendredi dernier. Après 2 jours de repos à Twizel, il était temps de repartir à l'aventure. Nous avions traversé la jungle et Copland Pass pour aller voir du côté du Mount Cook alors beau temps ou pas, on se devait d'y faire un tour. Vendredi, après avoir retrouvé pour un soir Justine, notre ange gardien de l'autostop, nous partons en stop direction Mount Cook Village. Prise d'informations, délestage des sacs (on a appris à marcher léger depuis Copland Pass) et enregistrement auprès des secours, le tout sous une pluie battante.

Un temps radieux, et en photo ce n'est rien

Pourquoi a-t-on quitté soleil et le buffet à volonté de Twizel déjà ? Ah oui, le Cook ! La météo n'est pas vraiment au mieux, comme depuis le début de notre séjour en fait. Re-stop jusqu’à Tasman Lake avec un couple de chinois qui nous prenne en photo pour motiver leur fils à faire pareil que nous et nous voilà sur le chemin. On dormira à Ball Hut, 2h de marche plus loin. Finalement la pluie cesse et on peut même bronzer en sirotant la bière d'un suisse de passage au refuge.

L'approche facile jusqu'a Ball Hut

Des alpinistes kiwis arrivent vers 16h. Ils visent Minaret pour le lendemain par une arête immense. Il leur reste néanmoins 12km de moraine avant de toucher la base de l’arête, et ils projettent d'y être pour 19h. Bonne route amis kiwis, on restera avec notre ami à la bière pour aujourd’hui. Une bons journée nous attend demain samedi. Le beau est annoncé et nous prévoyons de monter à Grand Plateau Hut par Cinérama Col, 1400 mètres et quelques moraines et glaciers plus haut.

L'approche pas facile jusqu'a Plateau Hut, commencant par 600m d'eboulis a remonter

Le travail quotidien d'ecriture

Lever 5h, départ 6h sans réveiller notre amical suisse. Prêt à bouffer du caillou les 500 premiers mètres. La marche est pénible, lente et laborieuse. Un pas en avant, deux en arrière. Nous voici finalement sur le Boys Glacier, réduit à peau de chagrin mais toujours vivace. Il commence a faire affreusement chaud, la neige réverbère la lumière et le soleil brûle la peau. Quelques circonvolutions autour et au milieu des crevasses et nous voici à Cinerama Col pour le déjeuner. Vue splendide sur le Grand Plateau Glacier encerclé par une couronne de pics aux faces gavées de séracs et aux glaciers lacérés de crevasses. Un mot sur ces glaciers s’impose. En France et dans les Alpes en général, les glaciers sont généralement assez débonnaires et quasi tous reculent au fil des ans. Ici, non seulement ils avancent, mais ils sont effroyablement grandioses. Les crevasses sont omniprésentes à l'œil nu, de même que les séracs qui pendent, immenses, partout où le regard se pose. Et encore, avec les récentes chutes de neige, les glaciers sont biens bouchés. On n'ose imaginer ce sur quoi on marche…

Ces tres sympathiques eboulis vus de plus pres

Les pentes de Boys Glacier

Le Tasman et une carotte

Au CInerama Col

Nous retrouvons à Plateau Hut un groupe de néozélandais et leur guide. Ilssont venus par hélicoptère, comme beaucoup des gens qui fréquentent le refuge, et sont impressionnés par notre temps de montée. Ils nous offrent la collation qu’ils ont apportés sans trop d'effort avec eux, et nous laisseront de la nourriture, nous félicitant d'avoir atteint le refuge à pied, chose qui à l'air de plus en plus rare selon eux. Nous discutons une partie de l’après-midi et alors que nous présentons notre projet de tour du monde des sommets, ils nous présentent leur projet à venir. Ils partent en février prochain pour l'Antarctique, où ils grimperont sur les sommets glacés selon la météo. Nous partageonss les coordonnés de nos sites, dans l’idée de grimper ensemble pendant notre séjour en Nouvelle-Zélande. Le leur, pour satisfaire votre curiosité, est Nzaht.org

La journée de dimanche est synonyme une fois de plus de repos dominical alors que les éléments se déchaînent contre les parois de notre hut qui tremble et vibre sans interruptions. On se croirait de retour dans l'avion. Aller aux toilettes 10 mètres à côté du refuge est une épreuve. Nous devenons des pros pour guetter l'accalmie et sprinter jusqu’aux lieux d'aisance. Les rafales reviennent vite pour nous balayer et nous jeter à terre pourtant… L’objectif e la journée : faire du jus ! Nous recevons led prévisions météo, qui semblent relativement bonnes, et nous décidons de nous lever 4h plus tard , a minuit pour un départ à 1h. L'excitation monte !

Quelques heures sans trop de sommeil plus tard, nous prenons notre petit-déjeuner, nous pouvons voir le ciel étoilé de l’hémisphère sud, et nous sommes remontés a bloc. Nous savons que nous partons pour une longue journée, 15h d’après le topo, et nous marchons a un bon rythme dès le départ : les crevasses et autres séracs suspendus obligent a un passage retour le plus tôt possible. Nous ne savons en outre pas vraiment si le beau temps va tenir. Il tiendra et superbement !

Le glacier de Grand Plateau, on distingue la Hut sous le dome a droite

Cinerama Col derriere nous

Des seracs de partout sur le Tasman, on distingue a gauche le debut de l'itineraire de Linda Glacier

D'autres ont choisi l'option facile pour monter

Je mène la marche sur le glacier inférieur, et se diriger dans l’obscurité complète au milieu de ce dédale de glace, a la seule lueur de la frontale est impressionnant. Néanmoins nous trouvons notre chemin. Ce qui est a chaque fois étonnant sur glacier, c'est qu'il n'existe la plupart du temps qu'un seul itinéraire, mais celui-ci existe !Les altimètres nous aident bien, nous prenons le virage vers Linda glacier a 2700m,nous évoluons a présent sur un glacier peu tourmenté, en légère ascendance. Nous sommes confiants, il nous reste les passages difficiles a négocier, mais nous avons mis 2h30 pour arriver jusqu’à 3200m, il ne nous reste plus que 500m et nous avons même peur d'arriver au sommet avant l'aube ! Prétentieux que nous sommes ! La montagne va nous remettre rapidement sur le chemin de l'humilité. Nous savons qu’il faut traverser sous les séracs du « gun barrel », pour rejoindre l’arête Bowie par des pentes faciles et attaquer les « summit rocks ». Nous ne le saurons que plus tard, mais nous montons trop haut et traversons sur les premiers séracs du gun barrel. Petite pause, nous pensons a présent attaquer les summit rocks, et nous attaquons un système de goulotte qui est pour nous l’accès a l'arête. Nous passons par des sections de glace et nous nous retrouvons sous des barres rocheuses. Nous commençons a douter, cela ne ressemble plus vraiment a une voie normale. A traverser dans la glace, nous perdons beaucoup de temps, et le jour commence a se lever. C'est un spectacle magnifique, nous voyons la ligne d'horizon a l'est passer par des nuances de violet puis de rouge, absolument incroyables.

La superbe aurore le jour du sommet

Malheureusement nous n'en profitons pas trop : avec cette visibilité , nous réalisons notre erreur ! Merde, nous sommes sur un pilier, a 200m trop a droite de l’arête où nous devrions être ! Nous continuons a traverser, les mollets chauffent et je comprends qu'il va falloir être plus délicats pour s’économiser jusqu'au sommet. Enfin, nous débouchons sur l’arête, enfin nous avons sur notre gauche la grande face est du Mt Cook. Arthur est frais comme un gardon, et prend la tête dans les summit rocks. Ceux-ci se révèlent bien équipés, régulièrement pourvus de relais nous rrassérénant Nous débouchons rapidement sur les pentes sommitales, et le sommet semble tout proche ! Finalement, il nous faudra encore un petit peu de temps pour fouler celui-ci ! Ces pentes sont en « écailles de poissons », de véritables écailles de glaces horizontales, dépassant juste assez pour que la corde s' y piège a chaque pas.

Ici nous ne sommes pas dans la voie

Traversee pour rejoindre la crete a notre gauche...

Sur les pentes sommitales, ca se couche...

Selfie BG

Le panorama de dingue, avec la langue glaciaire du Tasman Glacier qui serpenteau fond

A 9h, nous sommes au sommet de la Nouvelle-Zélande. Le temps est superbe, il y a peu de vent ! Nous sommes heureux, après tant de jours d'incertitudes, de parvenir a l'objectif principal de notre première destination !

Summit! Le lac Pukaki au fond!

Une maniere de tenir le drapeau...

Une autre maniere...

Le drapeau de la Voix des Cimes flotte un peu trop bien, quelques photos, et nous prenons le chemin de la descente, prudemment : le soleil tape fort sur ces pentes glacées, et nous en désescaladerons une majorité. Quelques rappels, et nous retrouvons les pentes neigeuses que nous aurions dû prendre à la montée. La descente du glacier sous un soleil de plomb se fait rapidement, dans la neige déjà lourde. Nous passons de nouveau au milieu des crevasses du glacier inférieur, cette fois en constatant le chaos que cela représente ! Il n’est pas rare qu’un pied disparaisse dans un abîme insoupçonné et Arthur, plus lourd de quelques kilos, trouvera une sympathique et inattendue crevasse pour l’accueillir jusqu’à la taille. Rien de bien méchant, mais nous sortons promptement de ce dédale qui devient toujours plus dangereux avec le soleil. Nous retrouvons la fourbe côte sous plateau Hut aux alentours de 13h, et nous nous étalons sur la plateforme du refuge, assoiffés mais tellement contents ! Les heures suivantes sont consacrées a un repas pantagruélique. Nous avons décidé de ne descendre de la hut que le lendemain, les pentes de neige chauffées a blanc, ainsi que les éboulis pour rejoindre Ball hut nous apparaissent moins goûtus que le fromage et les sardines !

La descente, rappels dans les Summit Rocks

Hey, je m'appelle Arthur et j'ai fait le Mt Cook!

En fait, le lendemain une nouvelle tempête est annoncée… Nous resterons donc une journée de plus enfermés dans notre belle prison. Enfin, mercredi, nous decollons dans un temps mitige. La pluie des derniers jours n'a rien arrange et les crevasses se sont bien ouvertes sur le Grand Plateau. Nous retraversons prudemment jusqu'a Cinerama Col, puis nous descendons facilement dans les eboulis pour rejoindre Ball Hut. Finalement, nous obtiendrons notre biere de recup bien plus tot qu'espere, puisque de forts sympathiques suisses, non content de nous prendre en stop, nous offrent de leur brevage! Arrives a Twizel, nous nous jetons une fois de plus sur le buffet a volonte du restaurant Thai local!!!

Retour a Ball Hut, c'est drole en regardant les photos on a l'impression qu'il fait tout le temps beau alors qu'en fait pas du tout!

Dans le camping car suisse, avec le Cook en arriere plan!!!

A present, il nous reste un mois en Nouvelle-Zelande, le temps passe vite a coups de semaines entieres en montagne! Nous nous dirigeons vers Wanaka et Queenstown afin de grimper un peu, et pourquoi pas aller fricoter avec un autre beau sommet du pays, le Mont Aspiring!

Enfin, une conclusion sur la pratique du metier de guide en Nouvelle-Zelande : Pour notre deuxieme jour off, apres le sommet, un groupe et son guide sont arrivés pour une semaine à Plateau Hut. Le guide, Dean Staples, est une petite célébrité dans le monde de l'alpinisme néo zélandais. Au début, nous ne soupçonnons rien puis en feuilletant les Montagnes Mag locaux nous tombons plusieurs fois sur sa photo. Un des articles mentionné son nom comme le premier kiwi à avoir grimpé l’Everest par ses faces nord et sud, et comme le détenteur du plus grand nombre d'ascension du toit du monde : 8 fois au total !! En discutant avec lui, il nous dévoile son secret. Il travaille pour l'agence de trekking et d'alpinisme Adventure Consultant. C'est en tant que guide au sein de cette entreprise qu’il a pu grimper a plupart des lus hauts sommets du monde, dont certain plusieurs fois. Everest, Aconcagua, Ama Dhablam, Khan Tengri, Shishapangma, Dhaulaghiri… Rien qu'en exerçant son métier de guide, il a foulé le sommet des Steven Summits, le Denali mis à part. Le rencontrer est une aubaine pour nous : en plus d'avoir une pointure en face de nous, nous en apprenons plus sur la vie des montagnards néozélandais, et surtout des guides.

Dean est guide a temps plein sans autre job à côté. Lorsqu'il nous l'annonce, il s'empresse d'ajouter qu’il est aussi célibataire sans famille ce qui facilité grandement une carrière de guide. Surtout en Nouvelle-Zélande. Devenir guide de haute montagne de qualification internationale est non seulement dur physiquement et techniquement, mais aussi financièrement en Nouvelle-Zélande. Comptez environ 30 000$ pour payer tous les stages de formation, sans compter les pertes de salaires que les longues absences impliquent. Beaucoup de guides néozélandais ne vivent pas de leur travail, et le métier, s'il est envisagé à temps plein, est définitivement incompatible avec une vie de famille. En comparaison en France, même si le métier de guide est contraignant pour les familles, les deux ne sont pas incompatibles.

Pourquoi est-ce si compliqué pour les guides kiwis ? Du fait des accès difficiles aux montagnes, de la météo maritime très capricieuse et de la logistique imposée en terme de nourriture et de carburant par les deux raisons précédentes, les saisons sont plus courtes qu'en Europe. Nous l'expérimentons actuellement : la moindre course prend 5 jours en comptant les approches infinies, sans compter le mauvais temps qui, une fois installé, oblige à rester enfermé dans les refuges. L'approche en hélicoptère est souvent privilégiée, mais a ses limites aussi quand il s'agit de budget ou de météo. Si les montagne néo zélandaise sont magiques, le climat n'est pas favorable à l'alpinisme. Dean nous l'a dit, un poil ironique : « Ici en Nouvelle-Zélande, on n'a aucun animal dangereux et mortel. Par contre la météo peut tuer et le fait assez régulièrement. » Ce n'est pas évident à comprendre lorsqu’on est en France et qu'on regarde les topos ou qu'on lit les récits d'autres voyageurs chez les kiwis. Le vent, même s'il souffle fort reste juste du vent, non ? C'est quand on lutte pour faire 10 mètres jusqu’aux toilettes du refuge qu’on prend conscience qu'on ne survivrait pas dehors sur les glaciers par un temps pareil… La puissance des éléments est juste extrême et l'Homme n’est alors rien de plus qu'un jouet insignifiant entre leurs mains.

Au final, en Nouvelle-Zélande les guides n'ont pas énormément de choix. Soit ils pratiquent leur métier en complément d'un autre et peuvent ainsi concilier vie familiale et vie professionnelle, soit ils pratiquent à temps plein au sein de grosses agences dans des expéditions internationales et lointaines. C'est ce que Dean Staples fait, et ce qui lui a permis de fréquenter les plus hautes cimes du monde. En partant au bout du monde pour notre projet, nous voulions aller à la rencontre des montagnards et des relations qui les unissent à leur montagne. En Nouvelle-Zélande, nous découvrons déjà une conception bien différente de chez nous. Tout est encore sauvage, inaccessible ou presque, complètement soumis aux caprices de la nature (et quels caprices !). Une simple marche peut devenir une mission survie et loin des villes, la nature reste plus hostile que bienveillante. Amis futurs explorateurs du pays au long nuage blanc, vous voilà prévenus !


Featured Posts
Recent Posts
Archive
Search By Tags
No tags yet.
Follow Us
  • Facebook Basic Square
  • Twitter Basic Square
  • Google+ Basic Square
bottom of page